Calligraphie
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La calligraphie est un art étonnant à plusieurs titres. Cette alchimie des quatre trésors du cabinet du lettré (encre, pierre à encre, pinceau et papier) a transformé ce simple excercice d'écriture en art du geste à part entière. Au delà de l'écrit nous nous retrouvons face à une œuvre, reflet de la sensibilité de l'artiste à tel point que peinture et écriture sont intimement liées.

Un jeu complexe se joue entre les capacités d'absorption du papier, la vitesse à laquelle la main de l'artiste se déplace et qui déterminera la charge d'encre, la fluidité de l'encre et le bon vouloir du pinceau qui, selon les poils qui le composent, délivrera plus ou moins vite son précieux trésor.

Cette dynamique complexe, cet art du geste donnera naissance à un dessin ou à un caractère dépouillé de toute surcharge qui sera le reflet d'un mouvement ou tout simplement d'une émotion.

Dessin d'un simple caractère ou poème, peinture complexe ou scène de vie, la représentation ne prend vie que dans l'espace de la feuille. Rattaché à une vision du monde basé sur "il y a" et "il n'y a pas", le vide de la feuille est (porte) déjà en lui même le dessin.
 

L'écrit ne peut se faire que dans une atmosphère de calme et de repos, laquelle sera propice à la créativité mais aussi à l'étude des classiques.

Vous aurez compris au cours de cette courte introduction que cet art demande que certaines conditions soient réunies afin de travailler ; tout d'abord un espace de travail bien éclairé et surtout au calme, ensuite le matériel (au minimum, pinceau, pierre à encre, encre et papier).
 
Pierre à encre - Une feutrine délimitera l'espace de travail. Le papier boit avidement l'encre et vous devez placer sous votre feuille, une matière absorbante. Etrangement la feutrine boit le trop plein d'eau sans se maculer d'encre. Le premier des trésors du lettré est sa pierre, sa pierre à encre. Son grain fin délitera avec finesse le bâton d'encre et la profondeur de son réservoir sera suffisante pour vous permettre de travailler confortablement.
Malgré l'importance capitale de la pierre à l'encre dans l'élaboration d'une encre de qualité, abandonnez toute chance de trouver l'oiseau rare à Paris, n'en faîtes surtout pas la recherche d'un absolu, vous connaitriez que déception. Guettez éventuellement des pierres de seconde main. A contrario, lors de l'achat d'une pierre neuve, soyez très vigilant, il existe des "fausses pierres". Elles sont souvent peintes en noir. La couleur de la pierre ne doit pas être uniforme mais variable selon la luminosité avec des reflets bleutés pour les pierres noires. De même vous devez voir les strates de la tuile pour les pierres en ardoise. Sur la zone où vous déliterez le bâton d'encre, la pierre au touché doit être légèrement rugueuse, c'est ce qui permettra de déliter le bâton.
 
Encre - Si vous êtes débutants, l'encre a pour l'instant peut d'importance. Par la suite sachez que les noirs plus ou moins mats ou brillants que vous rechercherez seront liés à vos bâtonnets. Préférez travailler avec des bâtons d'encre que vous déliterez qu'avec de l'encre liquide ; celle-ci sera utilisée pour d'autres occasions.
Bien que cela puisse paraître fastidieux, il est important de consacrer toute son attention à la fabrication de son encre. C'est la première mise en condition avant de travailler. L'encre est prête quand le trait réalisé est bien noir, propre et sans bavure. Lorsque que vous connaitrez bien votre baton d'encre, l'odeur sera le premier indicateur avant la viscosité de l'encre, pour savoir si celle-ci est prête. Oubliez les bâtonnets de couleurs. Si vous souhaitez faire de la peinture chinoise choisissez plutôt de la peinture en tube.
 
Le pinceau - Le pinceau est le troisième trésor du cabinet du lettré. Il en existe de toutes sortes. Ils sont classés selon leur type de poils (loup, blaireau, chèvre, cochon ...) qui peuvent être mixte, leur taille, les techniques de fabrication, leurs utilisations potentiels. Sur la photo ci-contre trois pinceaux différents afin de peindre (de gauche à droite) des caractères chinois, coréens ou japonais.
Prenez le plus grand soin de vos pinceaux. Ils sont séchés et stockés la tête vers le bas. Pour les nettoyer, ne les faîtes pas tremper mais passez les sous l'eau. Les poils du pinceau partent au fur à mesure que le pinceau vieillit, c'est normal pas d'affolement. Les pinceaux doivent avoir un minimum de qualité. N'achetez jamais vos pinceaux dans une boutique de souvenir, ni chez Pier Import ou autres magasins ethniques. Choisissez comme lieu d'achat une librairie chinoise (La Phœnix, 72 boulevard Sébastopol, 75003 Paris), une boutique de médecine chinoise (Ets Phu-Xuan, 8 rue Monsieur Le Prince, 75006 Paris) ou une papeterie coréenne (Espace Franco-coréen, 55 rue des Entrepreneurs, 75015 Paris).
Deux pinceaux de taille moyenne représentent un matériel suffisant pour débuter. Les pinceaux sont vendus avec un bouchon de bambou ou de plastique. Ce bouchon ne sert qu'à assurer la sauvegarde du pinceau pendant le transport. Jetez ce bouchon dès la première utilisation du pinceau.
Les poils d'un pinceau neuf sont collés. Il faut donc laisser tremper le pinceau dans une eau tiède pendant une vingtaine de minutes. Nettoyez bien votre pinceau avant sa première utilisation afin d'éliminer tout résidus de colle. Le pinceau est un réservoir. Au départ sa charge d'encre doit-être suffisante mais pas importante. N'hésitez pas à assécher un peu le pinceau sur la pierre à encre avant de débuter un caractère. Ne reprenez jamais d'encre pendant la réalisation d'un caractère, par contre si cela s'avère nécessaire aider vous de la pierre à encre pour relisser les poils du pinceau.
 
Le papier - Le papier est le dernier casse-tête (chinois ?) auquel vous serez confrontés, le dernier trésor. Nous entrons dans un domaine hautement complexe, où la taille du grain, le temps de séchage, le mode de fabrication, la météo extérieur pendant la préparation de la mélasse, le type de fibre végétale ... vont influer sur les qualités d'absorption du papier.
Laissez donc et gagnez d'abord en expertise sur la qualité de vos tracés et de vos déroulés, maîtrisez d'abord les débits de vos pinceaux avant de vraiment vous intéressez aux problèmes du papier. Si vous sentez tout de même intuitivement que seul un papier de qualité supérieure vous permettra de réussir, la papeterie Franco-coréenne du 55 rue des entrepreneurs a de très bons papiers.
Pour s'entraîner au tout début on se contentera d'un papier de brouillon (quadrillé) afin de bien situer, dans l'espace vide de cette feuille, les caractères. Dès que cette maîtrise spatiale sera acquise on passera à un papier de qualité moyenne pour commencer à prendre possession de cette espace de création qu'est la feuille vierge. N'ayez pas peur du vide de la feuille et ne cherchez pas à remplir ce vide.
 

Deux sceaux fantaisies. L'un pour mon fils et l'autre pour moi afin de signer nos œuvres.

Nous voilà arrivez à la fin de cette présentation. Celle-ci s'adresse au débutant tel que j'ai pu l'être aussi. Si vous avez des remarques ou des questions sur des points qui vous semblent obscures n'hésitez pas à prendre contact.

Ne jetez pas vos travaux, conservez les et n'hésitez pas à revenir dessus. Travaillez régulièrement et accordez vous des séances plus ludiques et plus créatives en changeant de support ou en variant la dilution des encres. Signez d'un sceau et n'hésitez pas à offrir votre travail. Les techniques de contre-collage et d'encadrement demande un certain niveau d'expertise. Laissez ce travail à un spécialiste. Je n'ai jamais essayé en France. De toute façon, oubliez les encadreurs classiques, même avec un produit déjà contrecollé, ils ne savent pas faire un encadrement adéquate afin de laisser l'air circuler derrière le papier.
 

Budget rapide

Pierre à encre = 15 à 30 €, encre = 5 à 7 €, pinceau = 5 €, papier de brouillon pour une dizaine de page = 1,5 €.
 

Des cours ?

Centre culturel Coréen : le mercredi de 18h à 20h. Ils sont sympas et les cours sont généralement gratuits.

Maison de la culture du Japon : c'est moins sympa et c'est beaucoup moins gratuit.

L'Aractère pour le chinois et le japonais.
 

Des artistes en France ?

Fabienne Verdier, François Cheng, Ouyang Jiaojia (que l'on peut rencontrer à l'Aractère), Shi Bo.

 

Quelques livres

Pinceau Chinois

I-Ching

Le Livre Atelier, Hatier 1999

Un livre avec du matériel de calligraphie fourni. L'idée est plutôt bonne mais, mis à part le papier, pinceau, pierre à encre et bâton d'encre sont à jeter. Ne parlons même pas des peintures. Néanmoins, le matériel est suffisant pour une après-midi d'initiation avant de vous équiper durablement. Par contre, les pages d'explications sont très bien documentées et très accessibles pour un débutant (mis à part la calligraphie). Des modèles sympas à réaliser et pleins de trucs pour jouer avec les couleurs et les tonalités.

Calligraphie Chinoise

Lucien X. Polastron

Caractères, Editions Fleurus 2001

Le must pour une intitiation à la calligraphie. Une pédagogie comme on en rencontre rarement, un apprentissage tout en douceur et progressif, des conseils différents selon les étapes de progression font de ce livre un must absolu pour tout débutant. L'ouvrage est fait de telle façon que l'on a vraiment l'impression de travailler sous l'oeil bienveillant d'un maître connaissant par expérience les erreurs que va faire l'élève.

Les secrets de la peinture chinoise

Pauline Cherrett

Editions Fleurus, 2000

Ce livre est très bien mais un peu difficile d'accès pour les débutants. Avant de se lancer dans la peinture chinoise, il faut déjà avoir une très bonne maîtrise du pinceau et savoir jouer avec les couleurs. Par contre, si vous possédez déjà certaines bases, cet ouvrage, très riche, vous permettra de progresser à partir de peintures de l'auteur ou de peintures classiques. Suite à la lecture, je suis tombé follement amoureux des canards grâce à ce livre et ne cesse d'en dessiner. Le livre est vraiment très bien et offre énormément de modèles différents afin de se laisser porter par la poésie du dessin. Il est à noter la peinture d'un chat qui est sublime.

500 Basic Chinese Characters

Patrick Lin

Sinolingua, Beijing 1999 (2ième ed)

Je prends celui-ci en exemple car il est très bien, comparé à "Caractères Chinois" de Edoardo Fazzioli (le livre rouge). De toute façon dès que l'on commence à maîtriser les techniques de calligraphie, il est important de travailler à partir de cahiers d'exercices ou de calligraphies de maître. A chaque page de l'ouvrage, on trouve un caractère avec sa disposition spatiale, sa prononciation, sa traduction, ses compositions .... des exemples, des excercices. Très complet et bien fait.